Une chambre d'hôpital

<< avant 4.

Elle roule un peu vite, mais rien à foutre. Elle se sent responsable en partie de ce qui est arrivé. Elle aurait du intervenir avant, avant qu’il ne l’envoie à l’hosto. Mais il n’est jamais trop tard pour faire payer. En attendant, il faut qu’elle voie Louise, pour prendre des nouvelles, en espérant qu’elle s’en sortira, sinon il paiera deux fois plus cher….

Quelques minutes plus tard, elle laisse la moto au parking de l’hôpital, et fonce à la réception.

- Je voudrai voir Louise Rosario.

La réceptionniste la dévisage, l’air peu amène, elle déteste les gens qui ne disent pas bonjour. Mais Silver elle, déteste perdre son temps et là elle n’a pas le temps de faire dans l’hypocrisie et politesses.

- Un instant je regarde.

Silver fulmine, ça va trop lentement, elle pianote des doigts sur le comptoir. L’autre remarque et fait une moue sans aucune ambivalence, pianotant de même sur son clavier.

- Oh elle vient d’être hospitalisée et…elle est encore en consultation. Elle ne peut donc pas recevoir de visite.
- Même pas de sa famille ?

L’autre la dévisage encore et finit par hausser les épaules.

- Section F, troisième bâtiment, quatrième étage.

Elle lui désigne une direction et sans ajouter un mot Silver se précipite aussitôt. Elle trouvera bien la jeune femme sur place. Après avoir parcouru un dédale de couloirs blancs illuminés, et d’ascenseurs, elle parvient dans une grande salle ou de chaque côté sont alignées des portes numérotées. Au centre, des bureaux, trois infirmières sont là en pleine discussion. Silver les interrompt sans façon.

- Je cherche Louise Rosario, on m’a dit qu’elle était chez vous.
- Oui, en effet, le médecin vient de la voir et elle se repose à présent.

Silver a perçu le regard de celle qui lui a adressé la parole, et la direction de ce dernier….. cinquième porte à droite, la 206, elle fonce.

- Hey mais attendez, seule la famille peut…
- Je suis de la famille, répond Silver sans même se retourner.

Devant la porte, elle ralentit, respire un peu plus vite. Les hostos, elle déteste ça, ça pue, c’est sinistre et cette atmosphère immaculée lui rappelle trop des souvenirs qu’elle voudrait oublier…

- Elle est malade la dame ?

Silver ferme un instant les yeux, depuis le temps, elle ne s’habitue pas et c’est toujours la même émotion de la revoir.

- Ever, murmure-t-elle, en appuyant son front contre la porte.

La gamine attend, ses cheveux longs blonds si soyeux lui tombent sur les épaules. Elle est tellement jolie, tellement pâle… Silver a du mal à se reprendre, pourtant il le faut. Elle lui sourit, glisse une main dans ses cheveux.

- Non, elle n’est pas malade, ce n’est pas grave Ever, ne t’inquiète pas…
- Madame ? tout va bien ?

L’infirmière s’est approchée. Silver la rassure, grimace un sourire.

- Ça va, ça va aller merci.

Elle se redresse, la gamine a disparu….. Alors Silver pousse la porte de la chambre et se retrouve dans un espace sombre, où seul le lit de Louise est éclairé, en partie par des écrans de contrôle où des bips réguliers témoignent de son état. Elle fait quelque pas et encaisse le choc de la vision de cette belle jeune femme qui à présent porte sur son visage les traces des coups, les bleus, la lèvre éclatée, la joue enflée, l’œil gauche n’est pas plus beau à voir. Il l’a pas ratée cette fois le salaud.

- Putain de merde ! jure-t-elle, réveillant de fait Louise qui ouvre son œil valide sur elle.

La jeune femme tente un sourire, mais le cœur n’y est visiblement pas, ce sont des sanglots qui secouent son corps, lui infligeant ainsi de nouvelles douleurs. Il lui a pété plusieurs côtes, perforé la plèvre et cassé un bras. Silver pose doucement sa main sur celle de Louise.

- Désolée, je ne voulais pas te réveiller… allez, ça va aller, chutt… calme-toi…. Ça va aller.
- J’ai voulu… j’ai voulu me défendre…. Mais… il est trop fort et…. Et je n’ai pas su..

Louise pleurait de plus belle, et Silver serra sa main dans la sienne, ne sachant que faire de plus.

- Tu as fait de ton mieux, Louise. Ce n’est pas de ta faute, c’est de sa faute à lui….et la mienne.
- La tienne ?
- J’aurais du faire quelque chose avant qu’il ne t’envoie à l’hosto

Louise ne dit plus rien, elle a compris que les mensonges étaient inutiles. Pourtant…

- Il avait bu….il devient fou quand il a bu…
- Et tu crois que ça excuse ce qu’il t’a fait ??? Ce mec devrait pourrir en prison ! ou en enfer !
- ….c’est mon époux…. Et je l’aime..
- Il a failli te tuer, Louise. Réveille-toi, merde !! Ce mec ne t’aime pas. Tu ne peux pas rester avec lui. La prochaine fois, crois-moi, il ne te ratera pas.

Elle la regarde, le visage dévasté par les larmes.

- Mais je n’ai nulle part où aller, et ma famille ne comprendrait pas, Bill, il n’a personne d’autre…. Je ne peux pas l’abandonner.

Putain, c’est pas possible d’être bornée à ce point ou aveugle…. Silver est à deux doigts d’exploser. Mais le cas est tellement classique. Elle sait déjà, elle le voit sur son visage, Louise retournera auprès de ce connard de Bill. Mais il ne sera pas dit que cette fois Silver n’aura rien fait pour que ça ne se reproduise plus.

- Ok… ok tu l’aimes, tout ça…. Ok… mais Louise, si tu ne fais rien, si tu ne portes pas au moins plainte, il recommencera, tu comprends ? Il faut qu’il sache qu’il n’a pas LE DROIT de te faire çA !!!!

Mais désemparée, Louise pleure, à court de mot. Que peut-elle faire d’autre de toute façon ? Elle s’était dit qu’en se défendant, elle pourrait éviter les coups, mais face à lui, ce n’était pas pareil qu’aux cours.. elle a paniqué et elle se retrouve à présent à l’hôpital.