Vient de…
Ambiance
Le bâtiment municipal qui abritait le musée d’Histoire de Heaven faisait en réalité parti d’un complexe architectural ultra moderne où les différentes sections se partageaient plusieurs niveaux. La section Art et Culture Indigène avait reçu en renfort les compétences d’un certain Professeur Pierce, arrivé il y avait à peine trois mois. L’homme, bien que détaché par le Gouverneur de la protection des œuvres traditionnelles des insulaires, avec tout le sérieux que lui apportait la charge de cette fonction, avait un comportement des plus anachronique qu’il soit. Souvent absorbé par une pensée obsédante, il en oubliait la plus part des prénoms de ses collaborateurs. Ses notes étaient un véritable fouille de griffonnage et l’accès à son bureau avait été rapidement devenu condamné. Non pas par autorité, mais juste par l’ampleur du capharnaüm qu’il y régner. Une chatte n’y aurait pas retrouvé sa portée dit le dicton, ici il prenait tout son sens. Mise à part ça, c’est un personnage aimable et un peu introverti aux yeux de ses collègues. Bref, un poil excentrique mais somme toute assez banal dans cet environnement d’étude. Chacun sait que tout les surdoués ont leur petit coté frappa-dingue.
Le long couloir des services administratif était déjà en animation lorsque Mr Pierce l’emprunta. Zigzaguant entre le flux humain de la bureautique, le nez dans son café, les yeux rivés sur l’article de sa feuille de choux, ne jetant un yeux qu’au dernier moment pour éviter l’accrochage, il réussit cependant le traverser. Comme à son habitude, il était en retard, remarqua-t-il en jetant un œil à la grosse horloge trônant au mur. Navré, il en jeta son gobelet de café dans une poubelle à ses cotés. Au lieu de s’infiltrer par la trappe, le gobelet y rebondit, libérant son reste de liquide. Une merveilleuse traînée se répandit sur une vieille affiche de propagande lors des dernières élections. Le candidat avait une jolie rigole sombre qui lui coulait le long de la jambe. Il y avait un caractère un peu scato pensa Alexander en examinant avec soin l’affiche. Puis il se reprit, examina avec un soin particulier si on l’observait, puis prit un air innocent en reprenant son chemin…le gobelet resté à terre. Il se dirigeait vers son bureau lorsqu’une voix l’interpella…à priori, cela devait faire un moment. Craignant pour l’affaire du gobelet, il se retourna avec l’air le plus dégagé qu’il soit.
-Oui ?...
-Professeur Pierce…. La jeune femme, stagiaire pour l’été à l’accueil, paraissait essoufflé...et prit quelques instants.
Alexander l’invita d’un haussement de sourcil interrogateur, poursuivre.
-Nous vous cherchions….partout…
-Oui…pourquoi ça ?
-Ils vous attendent, Professeur.
-Ils m’attendent ?...Qui « ils » ?
-Les étudiants de troisième année d’Histoire…Il y avait une visite aujourd’hui, c’était prévu.
-Les étudiants ? Les étudiants…Ah oui… Fit-il, comme reprenant conscience. Les étudiants….ils sont déjà là ?
-Oui Professeur, dans le grand hall, ils vous attendent.
-Oh….Ah. Il réfléchit quelques instants, puis : Tenez moi çà un instant.
Il lui confia sa sacoche, quitta son imper et lui roula dans les bras, glissa ses journaux entre les mains, farfouilla dans sa sacoche pour en extraire une dizaine de feuillet et commença à s’en retourner.
-Dans le grand hall ?...
-Oui Professeur…Alors qu’il s’éloignait déjà…
Il se retourna à moitié tout en continuant de marcher.
-Merci…euh, Sus ?...Non, Margar…
-Maggie…
-Maggie….rhoo, je le savais…
Manqua percuter un homme en se retournant…et trouva enfin son chemin pour rejoindre ses visiteurs. Plantant la jeune stagiaire avec ses affaires entre les bras, ne sachant qu’en faire.
Une vingtaine de minutes plus tard, une quinzaine de jeunes l’encadrant de près, le professeur Pierce décrivait une sculpture du IVème siècle prouvant l’activité artistique sur l’île bien avant les flux de migration connus. Il semblait maîtriser son sujet malgré ses fréquents coups d’œil à ses notes, et son public semblait attentif. Il en était à sa quatrième série de « pardon, pardon, pardon » pour traverser son auditoire, évitant d’être touché par quiconque, quant il s’aperçut de son erreur. Les deux premières feuilles concernées bien le sujet de la visite, mais le reste n’avait aucun rapport puisque qu’il s’agissait de la culture rupestre découverte dans la corne africaine. Dépité, il jeta ses écrits dans une poubelle à proximité. Il lui faudrait compter sur son bagou naturel pour embobiner les jeunes…et puis il connaissait son sujet…un petit peu tout du moins…suffisamment.
Le groupe recommença à bouger, poursuivant la visite dans l’ordre décousu que lui imposait par leur guide. Le bras d’un homme en complet noir plongea dans la poubelle, récupéra les feuilles et les engouffra dans l’intérieur de son veston. Il se dirigea calmement vers la sortie.
Va à...