Jane Doe Admin
Messages : 14 Date d'inscription : 18/07/2011
| Sujet: Autrefois, Villa... Blanca Ven 15 Juin - 1:25 | |
| Don't Forget... Le soleil se lève à peine sur l'île qui n'a de paradis que le nom, lorsqu'un véhicule aussi sombre que les ténèbres glisse le long du trottoir, ralentit, à l'approche de ce qui ressemblerait maintenant à un terrain vague, s'il se trouvait n'importe où ailleurs que sur Heaven Island. Evidemment dans ce quartier, cela aurait détonné, parmi toutes ces villas luxueuses, au bord de cette plage hupée.
Son regard traverse les vitres fumées, se pose là où se trouvait le porche. Un demi-sourire se forme, sur la partie visible de son visage, pourtant, le souvenir n’est pas heureux mais …- Tu souris n’est-ce pas ?Elle ne se donne pas la peine de détourner la tête pour foudroyer du regard son compagnon, il ne la verrait pas, même s’il devine les expressions d’une manière déroutante, sans l’usage de la vue.- Tu as raison, garde le silence, ça vaut mieux qu’un mensonge éhonté.- Comme ta cécité ?- Je suis aveugle, pas sourd, ni stupide. En revanche… ça m’empêche de voir ce qui peut bien t’arracher un sourire alors que nous sommes seuls.Le buste frêle se soulève sous l’étoffe de sa robe quand un soupir vient le gonfler.- Quelqu’un s’est fait craché aux pieds, le jour de son entrée dans cette villa.- Je croyais que c’était un terrain constructible. - Ça ne l’a pas toujours été. - Que tu puisses sourire à quelque chose de si barbare … C’est presque plus étonnant encore qu’un simple sourire. Tu as des souvenirs ici ?Cette fois, elle se tourne vers lui, légèrement, doucement, avec le silence et la souplesse autrefois acquis, pour le dévisager dans être perçue. Il n’a rien de dangereux. Aucun contact avec personne, pas de famille, pas d’amis… personne. Il ne peut recueillir d’informations, voilà trois années qu’elle s’en est assurée. Ce n’est pas pour autant qu’elle a su s’habituer à son instinct et à sa curiosité, elle qui a toujours eu horreur des questions.- Je ne suis jamais venue sur cette ile, je te l’ai dit. - Qu’en sais-tu alors pour cette villa ? - Léo, tais-toi !La sécheresse de son ton claque dans l’habitacle comme une gifle. Lui, pourtant, ne se départit pas de son sourire, visiblement habitué à ces intonations commandeuses. Les lèvres du jeune homme se pincent alors qu’il s’incline légèrement, comme pour percevoir, par son regard inerte, ce qu’elle voit en ce lieu. Elle reste ainsi, à l’observer quelques secondes, une minute peut être, avant de relâcher son souffle lentement et se détourner. Sa voix s’est adoucie, teintée de douleur, comme souvent, depuis qu’ils sont arrivés ici, quelques mois auparavant.- Je te l’ai dit, j’ai à faire ici, une mémoire à honorer. - Quelqu’un de proche ? - Plus proche et pourtant plus éloigné qui quiconque ne pouvait et ne pourra l’être.Là où se dressait auparavant une grande bâtisse aux murs blancs, majestueuse, il n’y a maintenant plus que le vent pour occuper l’endroit. Le vent, et les souvenirs… comme des fantômes paresseux, refusant de faire l’effort de s’éloigner, stagnant sans cesse autour d’elle.- Depuis que nous sommes arrivés ici, tu n’es sortie que deux fois de la maison, deux fois pour venir ici. Tu devrais voir du monde, rester devant un terrain inoccupé n’est pas ce que je voulais dire par sortir, quand je te le suggérais. - C’est suffisant. Et je ne me lasse pas de la beauté de l’endroit. - La beauté d’une parcelle constructible ?Les sourcils du jeune asiatique se haussent, étonné, sceptique même.- Même si tu pouvais voir, tu ne pourrais voir ce que j’y vois. - Alors dis-moi, décris-moi cet endroit ! Tu es habituée aux demeures plus somptueuses les unes que les autres, qu’est-ce qui peut bien t’être si plaisant ici ?Un soupir, encore, non pas de dépit, mais un de ceux qui insuffle le courage en repoussant la crainte, un de ceux-là qui permettent de reculer pour mieux sauter, même s’il n’autorise pas à savoir jusqu’où l’on va s’arrêter.- Là, juste en face de ma portière, il y a un portail majestueux, donnant sur une cour de graviers qui crissent sous les pieds à chaque pas. Le blanc de la façade est si étrangement immaculé qu’aux heures où le soleil tape dessus, il devient presque impossible de regarder la villa en face, les yeux nus… Et ce que l’on voit d’ici n’est rien, à côté de l’intérieur et de la terrasse de derrière…. De la plage…Déjà, il sait qu’elle n’est plus avec lui, elle parle mais est partie vers un autre lieu, existant uniquement dans son esprit, arpentant des dallages, du sable et des graviers. | |
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